Vous avez peut-être déjà entendu ces mots : accompagnement patient, patient centered care, patient centricity, supportive care, value based health, life management, prévention, homecare. Ils sont partout. Ils sont les concepts de cliniciens, de sociétés savantes, de startups et d’industriels ; et pourtant ils décrivent tous une seule et même tendance. Celle du « prévenir plutôt que guérir » ; celle du care plutôt que le cure ; celle de la santé plutôt que le soin.
Mettons ici de l’ordre dans ces concepts et tentons d’expliquer cette convergence d’intérêts.

L’accompagnement par les cliniciens

Plusieurs spécialités médicales développent des approches d’accompagnement du patient, essentiellement dans les maladies chroniques. Pourquoi ? Pour limiter les effets indésirables des traitements et faire de la prévention secondaire. Et parce qu’on a des résultats cliniques qui prouvent que ça marche ! On sait par exemple que dans plusieurs maladies chroniques, l’activité physique adaptée (APA) limite les récidives ou la progression de la maladie.

On appelle parfois l’accompagnement de la maladie « soins de support » ou Supportive care ou encore Patient centered care. En vérité, toutes ces approches se ressemblent et partent de l’hypothèse que l’accompagnement du patient atténuera la maladie. L’émergence de cet accompagnement clinique a pour conséquence directe la création de services : centres d’accueil, plateformes de communication, coordination des soins, soins à domicile, applications de suivi, etc…

Mais l’accompagnement intéresse aussi les entreprises de santé

Les industriels de la santé font face à plusieurs défis : la preuve de l’efficience de leurs offres, le besoin de se différencier, le besoin de gagner en valeur. A ça rajoutons le défi de s’adapter à un nouvel écosystème : des réseaux de patients puissants et des nouveaux concurrents créateurs de services en santé.
Pour toutes ces raisons, les industriels se sont engagés dans le développement de stratégies dites « beyond the pill ». Comprendre : ils deviendront acteurs de services. Car les services sont l’occasion de la différenciation et de la valeur ajoutée.

Une chose intéressante : ce renouvellement, cette innovation par les services, passe par une culture nouvelle : le/la patient centricity. Donc les industriels aussi replacent le patient au centre, exactement comme les cliniciens le font dans le patient centered care : pour comprendre ses besoins, pour penser son accompagnement. Même si c’est par un autre chemin, les industriels sont donc aussi passés de la culture du soin à la culture de la santé.

Etablissements et assureurs, aussi

Les assureurs santé américains ont compris que pour limiter les coûts de prise en charge, il fallait considérer le parcours global du patient : car les traitements à l’hôpital ont des effets en ville, et vice versa. Les établissements de soins quant à eux cherchent à proposer de meilleurs résultats cliniques à leur « clients », dans un contexte concurrentiel. De là est née l’approche Value Based Health (VBH) qui se concentre sur l’offre de valeur telle que perçue par le patient. Ici c’est l’optimisation économique qui a poussé ces acteurs à… se centrer sur le patient. Concrètement : ils développement de nouveaux indicateurs de qualité de vie, comme le niveau d’anxiété; ils raisonnent sur des périodes de soins et non plus des lieux de soins.

En Europe, les modèles sont moins avancés mais clairement, la médecine préventive et la facturation au forfait sont sur la table.

Convergence inespérée vers le patient

C’est assez étrange d’avoir à écrire ceci, mais les intérêts n’ont jamais autant convergé vers le patient. Ceci a 2 conséquences :
- L’apparition d’une culture de l’expérience utilisateur. Partout se pose la question d’étudier au mieux les parcours réels, la prise de décision, les besoins du patient, les parties prenantes....

- L’émergence d’une nouvelle industrie de services en santé. Services qui ne seront pas uniquement eHealth car, dans un premier temps, la santé ne pourra se passer du « monde réel ». Dans cette nouvelle industrie, des challengers inventent les nouvelles expériences, mais les acteurs historiques ont aussi des atouts majeurs.•